IIEG
25 juin 2025

Gabon : Vers une recomposition des paysages politique et économique gabonais

flag-2526375_1280
Partager :
Picture of Antoine Lawson

Antoine Lawson

Une élection présidentielle a eu lieu  au Gabon le 12 avril 2025 et a été remportée par Brice Clotaire Oligui Nguema, précédemment Président de la Transition depuis le 30 mars 2023, date du coup de force qui a vu le départ d’Ali Bongo Ondimba du pouvoir.
Brice Clotaire Oligui Nguema qui faisait partie des 8 postulants au fauteuil présidentiel du Palais du bord de mer au Gabon,  a largement remporté cette élection
 présidentielle avec plus de 94%  des suffrages exprimés. Ce ne fut pas une surprise  car une adhésion populaire était en marche et la Constitution modifiée à la suite d’un Référendum écartait d’emblée les candidats qui pouvaient lui faire barrage. Au lendemain de cette victoire confirmée et proclamée par la Cour Constitutionnelle, il n’ y a pas eu de tensions internes comme  ce fut le cas en  2009, 2016 et 2023; juste après la publication des résultats.
Le seul candidat qui pouvait donner la réplique à Oligui Nguema au cours de cette élection présidentielle était Alain Claude Bilie By Nze, qui malheureusement, n’a pas réussi à s’attirer la confiance d’un plus grand nombre d’électeurs. Arrivé en seconde position avec un peu plus de 3% des voix,  il réussit tout de même à se positionner comme  le nouveau chef de l’opposition.
 

Quelles sont les espérances attendues par les électeurs et qu’est ce qui va changer notamment pour les investisseurs étrangers ?

Les investisseurs, quant à eux, attendent plus de rigueur dans  la législation du droit des affaires, une application souple des Codes minier et pétrolier, notamment, mais également plus d’assurance et d’accompagnement en terme de finances pour mener à bien les grands projets qui tardent à se concrétiser.
Au lendemain de l’élection présidentielle, les regards sont tournés vers la formation d’un nouveau gouvernement  qui devrait prendre en compte les efforts conjugués des différentes alliances qui ont favorisé  la victoire d’Oligui Nguema qui ne se présentait pas sous la bannière d’un quelconque parti politique, mais en indépendant. Le nouveau président de la République Brice Clotaire Oligui Nguema avait obtenu  le soutien de la quasi-totalité des forces politiques, qu’elles soient issues de l’ancien système PDG, de l’ex-opposition qui a participé à la transition, comme les ténors Alexandre Barro Chambrier ou Paulette Missambo, ou de voix jadis très critiques de la société civile comme le défenseur de l’environnement Marc Ona Essangui ou l’avocat Anges-Kevin Nzigou.
Après la phase protocolaire de la  cérémonie d’investiture du président élu qui est prévue le 3 mai 2025,   il y aura certainement  la formation d’un gouvernement  d’union nationale, assez large, pour récompenser les acteurs de cette  victoire car Oligui Nguema avait besoin d’un large soutien, notamment celui du Parti démocratique gabonais (PDG) dont il prônait pourtant la rupture avec l’ancien système mais qui l’a finalement soutenu et fait élire.
 

Le  prochain gouvernement  sera-t-il constitué d’officiers supérieurs issus du Comité pour la Transition et la restauration des Institutions (CTRI) ?

La question reste posée car pour être  candidat à l’élection présidentielle du 12 avril 2025, le général de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema avait dû se passer de son uniforme de militaire pour se présenter en candidat civil. Oligui Nguema aura-t-il totalement les mains libres pour diriger le pays sans ses anciens frères d’armes ? La question reste posée. Les transactions entre les partis, les associations, ont certainement débuté.  Le plébiscite d’Oligui Nguema repose sur la résolution des besoins immédiats d’un peu plus de deux (2) millions de Gabonais en réduisant dans un premier temps les inégalités. Il n’y a pas de classe  moyenne importante au Gabon. Et c’est  une frange de la population qu’il faudrait constituer. Il est indéniable qu’Oligui Nguema risque d’être plombé à un moment donné par l’ex parti au pouvoir qui s’est mobilisé pour sa victoire. C’est le signe également que plusieurs ministres actuels quitteront leur postes dès la formation du nouveau gouvernement dont la  date n’est pas encore connue.
Une révolution économique qui passe par une meilleure gestion des ressources du sous-sol gabonais.
Pour mener à bien les projets miniers,  la mise en valeur des gisements de fer de Belinga, de Baniaka et de Milingui, des investissements à forte valeur ajoutée sont indispensables. Les infrastructures et  le potentiel énergétique national n’ont pas encore trouvé des solutions. Le challenge premier sera, en effet, la construction des routes, des ponts, des ports en eaux profondes et des voies ferrées à deux voies. Mais également des centrales électriques pour fournir de l’électricité suffisante au bon fonctionnement des usines.  Cela nécessite de gros apports financiers que le Gabon et des investisseurs étrangers devront débloquer.
Avec la fin de la période de transition et le retour à l’ordre constitutionnel, les capitaux étrangers devraient abonder pour accompagner le  développement économique et social du pays.
Aujourd’hui, il y a plus d’assurance car la Gabon aborde le long terme avec un environnement qui gagne en confiance et qui va rassurer les investisseurs étrangers. Les chantiers qui attendent le gouvernement sont colossaux . Il y a également la dette publique du pays. Pour  trouver des solutions adéquates, il faudrait que le président élu s’entoure d’experts et des meilleurs spécialistes dans les domaines clés de l’économie.
La question qui reste posée  est celle de savoir si le président de la République Brice Oligui Nguema qui a fait ses classes sous le régime Bongo, disposera des pleins pouvoirs pour diriger le pays et cela au niveau de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il faudrait sans doute attendre environ quelques mois de gouvernance pour apprécier la valeur et le cap des réformes initiées.
Un nouveau président sous le poids de nombreux chantiers
Le  pari pour une autre façon de diriger le pays aborde une nouvelle ère.  Outre le volet politique, les regards sont tournés à présent vers le développement économique du pays qui a pris beaucoup de retard par rapport aux richesses dont il dispose. Une expansion économique souhaitée et qui passera par une meilleure répartition des revenus au sein de la population. L’élection de Brice Clotaire Oligui Nguema est considérée comme un renouveau au Gabon. Mais de grands chantiers attendent le prochain gouvernement.

 

Quelles sont les personnalités  qui composeront le  prochain gouvernement ?

Elles sont nombreuses à frapper à la porte de celui-ci.  Commençons par Hermann Immongault, le ministre de l’Intérieur, dont le département a organisé le vote à travers le pays. Il y a également le Premier ministre actuel Raymond Ndong Sima;  le Vice Premier ministre Alexandre Barro Chambrier; Mais également Jean-Pierre Oyiba le coordinateur général de campagne de Brice Clotaire Oligui Nguema. Quelques personnalités de la société civile nommées par Oligui Nguema au Sénat, à l’Assemblée nationale, au Conseil économique, Social et Environnemental (CESE), pourraient sans doute, faire partie du prochain gouvernement. Certains candidats qui, lors de l’élection présidentielle avaient ouvertement rallié le programme du président élu, pourraient se voir récompensés. C’est le cas de Alain Simplice Boungoueres, leader du Mouvement des citoyens gabonais (MCG). ce dernier proposait, entre autres, la création d’un Fonds souverain du pardon national (FSPN) , doté de 40 milliards de francs CFA, destiné à permettre le retour des exilés politiques gabonais, victimes d’injustices, en leur offrant une terre et une compensation financière.
Au lendemain de sa victoire, le président élu Brice Clotaire Oligui Nguema a invité ses collaborateurs à poursuivre les efforts déployés durant les 19 mois écoulés.  Pour lui, « l’élection présidentielle est passée et le travail doit se poursuivre ».
La population gabonaise est estimée à un peu plus de 2 millions d’habitants.  Les ressources  sont abondantes  mais  l’économie  gabonaise a toujours été dominée par l’exportation du bois, du manganèse, du pétrole et bientôt par le fer puis bien d’autres  métaux précieux. Malgré ce potentiel économique intrinsèque,  le Gabon doté d’une superficie de 268 000 km2 et couverte à plus de 80% par une forêt dense, a du mal à accéder à une croissance durable et inclusive. Même s’il est reconnu que  le Gabon dispose du Produit intérieur brut (PIB) par habitant le plus élevé en Afrique, la distribution des richesses au sein de la population reste toujours inégale et en 2022, selon la Banque Mondiale,  un Gabonais sur trois vivait encore sous le seuil de la pauvreté.

À Télécharger

Recevoir la newsletter hebdomadaire de l'IIEG

Toutes les semaines, toute l'actualité de l'IIEG regroupée en un seul mail (analyses, évènements, parutions, etc.).